“L’eau dormante” de Jean Orizet
L’eau dormante ne dort pas;
Elle rêve, j’en suis sûr,
Car son rêve,
Elle le murmure,
L’eau dormante ne dort pas;
Elle rêve, j’en suis sûr,
Car son rêve,
Elle le murmure,
Je suis la plus belle des roses,
Chantait une rose à ses soeurs.
– Sache garder tes lèvres closes,
Conseillait-on avec douceur,
La salade qu’arrosa
dès l’aurore la rosée,
avait la crinière en pleurs.
Elle alla chez le coiffeur,
exigeant que l’on frisât
sa chevelure irisée.
Trop timide, la tomate
devient écarlate
quand on lui dit qu’elle est belle.
Un rien l’épate,
elle se dresse sur ses pattes
pour imiter les hirondelles.
Un chat persan de race altière
contemplait d’un oeil méprisant
le poil ras d’un chat de gouttière.
Un crabe aimait une méduse
que l’éloquence du lourdaud
rendit bientôt toute confuse.
Deux petits chats s’entrebâillaient
épuisés
en fin de journée,
la moustache perplexe
et la queue circonflexe.
Le miroir a plus de cent ans.
Sa peau de glace est tachetée
Comme le front ridé des vieilles
– Petite fille magique,
Dit le miroir,
Peux-tu me rendre ma jeunesse ?
Casque de fer, jambe de bois
Le roi revenait de la guerre.
Jambe de bois, casque de fer,
Il claudiquait, mais chantait clair
A la tête de ses soldats.
Soie de Nemours, velours de Troie,
La reine attendait sur la tour.
Quels sont ces bruits sourds ?
Ecoutez vers l’onde
Cette voix profonde
Qui pleure toujours
Et qui toujours gronde,
Quoiqu’un son plus clair
Parfois l’interrompe…